LA PERMISSIVITE MUSICALE
Ou
Une Petite Sortie hors des Sentiers Rabâchés
Etant de puis longtemps assez fouineur dans tout ce qui est
progressif et étant toujours le premier à discuter du
fond et des formes, étant également quelque peu
documenté sur le sujet, bref, étant un chieur de
première, les autres membres de Madelgaire m'ont
demandé de définir le Rock Progressif afin de
compléter notre site par une ou deux pages documentaires,
très courtes si possible.
Le but est d'inviter à un débat avec des personnes
extérieures au groupe, des fans, des musiciens ou des
surfeurs de toutes provenances.
J'ai accepté, justement à un moment où je
remets beaucoup de choses en question dans ma perception de la
musique et du progressif en particulier et parce que le
médecin a dit que j'allais mieux.
Certains prendront cette démarche comme un accès
d'intellectualisme pédant mais je leur rappellerai que, de
tout temps, les formes culturelles (dont la musique populaire et
ses sous-genres par exemple) ont été
révélatrices des tendances et des
références de notre société et de sa
santé.
De plus, depuis environ le début des années 90, il
y a un revival indéniable du genre.
Il n'est donc pas négligeable d'en parler de temps en
temps.
Et puis j'ai une heure à perdre alors…
Au début des années cinquante naît
une forme musicale simpliste qu'on appelle Rythm'n blues, puis
Rock'n roll et qui vient des USA.
Son transit vers notre vieux continent est facilité par
la mouvance économique d'après-guerre.
Finies la guinguette, les farandoles et la musique folklorique
pour les jeunes européens, c'est le temps des parties et de
l'émancipation contre l'ordre établi, l'establishment
à qui on a si souvent envie de dire " fuck ! " vers
l'âge de 14-15 ans.
Tout ce qui va avec cet establishment est banni :
l'école, l'éducation, les pensées
conservatrices et tout ce qui y fait référence, et
donc la MUSIQUE de papa (ou grand-papa, c'est selon…) : le
Jazz et surtout la Musique Classique, musiques d'initiés
croulants qui en prennent ainsi pour leur grade.
Les jeunes dansent et s'éclatent sur les tubes de
Presley, Little Richard, Chuck Berry et tous les autres, et non
plus sur les valses de Strauss ou le swing du vieux Glenn
Miller.
L'industrie du disque alors naissante voit directement le parti
économique qu'elle peut tirer de cette musique si simple et
vite faite, standardisée par ses soins à une
durée de 2 à 3 minutes et qui permet d'instaurer le
culte de la Rock-Star, basée sur l'imagerie et l'attitude
plus que sur la créativité.
Jusqu'à aujourd'hui, ce rock'n roll et ses
dérivés vont être les maîtres du disque,
des ondes radio, de la TV et sera l'emblème de la
pensée des jeunes occidentaux souvent reprise sous
l'étendard : " Sex, Drugs and Rock'n Roll ".
Le rock est devenu un phénomène de
société qui a marqué à jamais la
deuxième moitié du 20ème siècle en
occident.
Cependant, en y regardant de plus près, ce mouvement
révolutionnaire n'est qu'une " limitation " du vocabulaire
des compositeurs : mélodies, rythmes, grilles d'accords,
durées et structures limitées à la base du
rythm'n blues, vocabulaire limité à environ 250 mots,
propos-bateaux destinés à la consommation d'un public
jeune et en mal de rébellion contre l'ordre établi et
surtout : démocratisation du mouvement (il suffit de se
mettre à plusieurs, d'apprendre 3 accords et d'avoir une
guitare).
Le rock est un très mince outil pour qui a envie de faire
de la musique d'inspiration.
Oserai-je le dire… dans le vaste univers du rock, et
ça n'a pas changé, la musique n'est qu'un
élément du décor au même titre que la
bière qu'on y boit, le joint qu'on y fume ou la bonne femme
(le mec) qu'on y drague.
Le rock, c'est un événement incluant un peu de
musique.
Pourtant un jour…
En 1967, les Beatles sortent "Sergeant Pepper's Lonely Hearts
Club Band"
L'album est cité comme la première pierre d'un
nouvel édifice qui ramène la musique à un bon
niveau créatif pour les foules.
A en croire ceux qui ont vécu ce moment, cet album-culte
était inattendu, inconcevable et révolutionna
complètement le Petit Monde de Don Camirock.
Les Beatles, pour la petite histoire, ont pété un
plomb en 1966 et ont décidé de faire autre chose que
des concerts inaudibles et du rock-bateau pour se consacrer
entièrement à la création en studio.
Cela les a menés vers des expérimentations sur la
composition, le mixage, les arrangements, le son... infaisables en
concert et jamais entendus auparavant…
Le disque offrait aussi, pour la première fois, sur 33
tours, non plus une compilation de chansons de l'année, mais
une suite de morceaux et chansons tournant autour d'un thème
général.
Sergeant Pepper fut ainsi le premier "album-concept",
possédant une histoire ou plutôt un " sentiment
général " mais aussi une imagerie photographique et
picturale travaillée dans le même sens…
Les premières pochettes marquantes de l'histoire du rock
datent d'ailleurs de cette époque et ce nouveau produit,
dans la mêlée des idées expérimentales,
anarchiques ou laxistes de l'époque (Hippies, Happening,
Pop' art...), part dans toutes les directions.
L'album est pour ces raisons multiples, cité comme le
premier album " Progressif " de l'histoire du rock (Beaucoup ne
sont pourtant pas d'accord avec cet avis mais ils n'ont qu'à
écrire leurs propres articles).
D'autres groupes et musiciens suivent le mouvement dans la
foulée, puisqu'il est enfin permis de faire autre-chose que
ce qu'on passe à la radio et sur 45 tours.
La nouvelle tendance est baptisée " Rock
Psychédélique " et ses acteurs connus sont les Who,
Pink Floyd, Frank Zappa, Cream, the Nice, the Moody Blues, the
Grateful Dead, Jimmy Hendrix, Jefferson Airplane, tous mus par les
accès de prescience que leur fournissent la drogue et les
hallucinogènes… et bien d'autres groupes et musiciens
qui sortent d'une façon ou d'une autre des canevas
établis par le rythm'n blues et le rock'n roll.
Le progressif part de ce vaste champ foisonnant
d'émancipation créative par rapport aux règles
d'or du rock.
Bientôt apparaissent ainsi d'autres groupes qui auront
leur heure de gloire dans les années 70 et donneront
véritablement au progressif ses lettres de noblesse.
Les plus connus, encore actifs aujourd'hui (quoique…)
sont Yes, Genesis, King Crimson, Emerson Lake and Palmer (ELP pour
faire plus court sur les pochettes),
Jethro Tull, Gentle Giant, Van der Graaf Generator,
Kansas… (je préfère arrêter
là.)
D'autres groupes célèbres seront aussi mais de
façon moins évidente associés au mouvement :
Led Zeppelin, Electric Light Orchestra, Deep purple, Queen, Pink
Floyd ou encore Supertramp par exemple...
D'autres encore plus éloignés viendront des
grandes valeurs du Jazz, menant le Jazz-Rock toujours plus loin :
Soft Machine, Mahavishnu Orchestra, Weather Report ou Chic Corea et
son groupe-concept "Return to Forever"... la liste et les
filiations sont encore longues...
C'est au travers de ces différentes tendances qu'on
établira plus tard des sous-genres : Symphonique,
Canterbury, Atmosphérique, Folk-Prog, Metal-Prog… et
on se la pète bien violemment à coup de discussions
d'esthètes…
D'autre part, avant de parler de Progressif, on parlera de Rock
d'Avant-Garde, de Art Rock, Rock Expérimental… de
fait, souvent les fans ne sont pas d'accord avec les classements et
chipotent sur des mots…
Concrètement…
Le progressif est une forme de rock.
En effet, il est principalement articulé autour des
instruments classiques du genre : basse-batterie, clavier et/ou
guitare, chant (pas toujours).
Caractérisé par une émancipation par
rapport aux règles classiques du rock, le progressif
retourne à la création musicale pure, sans
limitations à un thème, à un son, un
arrangement, une durée ou un rythme, sans se
préoccuper d'un chant si on n'a rien à dire, sans
absolument faire danser ou hurler les foules, sans avoir besoin
d'un look ou d'une attitude particulière : la musique est le
seul but, le moyen et la fin.
Le rock progressif correspond à une forme de
pensée typiquement occidentale se basant principalement sur
la beauté des canons de la musique classique moderne et
post-moderne (de Mozart à Schönberg), dont les
caractéristiques esthétiques sont la mélodie,
l'harmonie, la construction narrative et la structure
rythmique.
Ce sont en effet les caractéristiques de tous les tubes
de la musique classique depuis la renaissance jusqu'à
aujourd'hui.
Les compositions progressives sont donc
caractérisées par une approche structurale rythmique
et mélodique où rien n'est laissé au hasard
(ou, dans le cas des improvisations de King Crimson par exemple, la
démarche devient hasardeuse mais c'est le but...).
Les compositeurs progressifs, influencés par les
génies et les malades de la musique classique, du Jazz et,
assez souvent par des formes musicales étrangères
(comme la musique javanaise dans le cas des incontournables King
Crimson (époque 1980)), tordent les harmonies et les
arrangements, déplacent le sens d'un rythme ou d'un accord,
choisissent l'arythmie ou la dodécaphonie et nous donnent
souvent des compositions " tordues ", parfois aux limites de
l'écoutable (5 UU's, Janic Top, Magma, Henry
Cow…).
On peut donc dire que le progressif revient aux enseignements du
Jazz et de la Musique Classique dans sa recherche mélodique,
ses rythmes et nuances, ses couleurs sonores et ses connaissances
techniques " académiques ", ce qui n'est pas étonnant
en ce qui concerne le classique vu les racines du vieux continent,
le nôtre, d'où est parti le mouvement progressif.
Les filiations évidentes sont légions : Emerson
Lake and Palmer nous proposent tout au long de leur carrière
des versions "rock" de symphonies ou concertos de Prokofiev ou de
Moussorgski.
King Crimson nous propose aussi des improvisations assez
similaires au Jazz ou au Free-Jazz.
Genesis et Yes développent des arrangements et des
mouvements atteignant parfois 25 minutes (la limite temporelle
à l'époque, d'une plage d'album) dans le style grande
symphonie.
Electric Light Orchestra fera un "Concerto for a Rainy Day",
Focus un "Hamburger Concerto", Kansas nommera un de ces morceaux
"Lamplight Symphony"...
Les structures de ces " longues chansons " se rapprochent
souvent de celles des longues suites symphoniques classiques :
ouverture, thème principal, intermède… le tout
liant plusieurs parties ou mouvements.
En clair, les groupes progressifs proposent de façon
générale des " morceaux " (plutôt que des
chansons) forçant une écoute attentive (cela dit, on
y trouve aussi des moments de transe comme aux concerts de
rock...).
L'orientation allant vers une liberté totale, on y trouve
de tout, sous des formes complexes ou simples.
Là se manifeste, outre la composition " tordue " typique
du genre, l'autre différence la plus évidente entre
le prog et le rock " à 4 temps " : la façon de jouer,
impliquant un bagage lourd de connaissances musicales inhabituelles
dans le rock et se manifestant par ce qu'on appelle la "
virtuosité " ou plus vulgairement : l'habileté
à jouer " 36.000 notes par minute ".
La virtuosité, souvent décriée ou mise en
avant pour vanter ou dénigrer les rockeurs progressifs, est
effectivement une pierre d'achoppement à double-tranchant du
genre.
En effet, quand on voit et surtout qu'on entend certains
musiciens comme Rick Wakeman (Clavier de Yes) ou Bill Bruford
(Batteur de King Crimson), on pense parfois à une certaine
forme de "Concours Reine Elizabeth" avec tous les clichés
associés à une ambiance de recueillement et de
respect.
Tout y concourt à penser (pour les adorateurs de la
spontanéité rock) que ces musiciens sont des machines
au service de la technique plus que du sentiment (ce qu'est la
musique) et donc, les ennemis du caractère vif,
irréfléchi et rebelle du rock classique (dont
l'incarnation ultime deviendra la Punk Music en 1976, on ne peut
moins réfléchi).
C'est là surtout qu'on verra les critiques de
l'intelligentsia du rock puriste s'insurger contre le progressif :
" On ne sait pas danser sur ce type de musique, c'est pompeux et
prétentieux, ils se prennent pour des dieux, ouh qu'il est
laid et prétentieux... "
Les limites permises du rock (ou plutôt sa raison
d'être), ainsi transgressées, des groupes comme Yes
seront adorés par une moitié du public et
détestés par l'autre.
Ce sera un peu différent pour King Crimson, qui avec son
côté " noir et cynique ", sera plus facilement
respecté par les noirs corbeaux décadents de cette
fin de millénaire.
L'utilité de cette virtuosité est toute relative,
parfois inutile, elle permet cependant une liberté totale
d'imagination et de création musicale nécessaire
à qui à envie d'aller toujours plus loin… plus
de barrières techniques, qui peut le plus peut le moins.
Pourtant, il est généralement toujours incongru de
voir un virtuose " concentré " sur une scène de rock,
sauf en de rares occasions.
Pourquoi le phénomène est-il si dérangeant
?
Tout simplement parce que la musique jouée demande alors
trop d'attention et n'offre plus seulement cette transe dansante
tellement sacrée dans l'univers du rock.
C'est surtout dérangeant pour la tradition du rock de
faire dans le technique et complexe, c'est une forme de rappel
d'une certaine scolarité trop " establishment " malvenue et
donc " au bûcher, les hérétiques ! ".
Le débat est long et encore d'actualité mais c'est
généralement sur ce point que les progressifs se font
attaquer par les tomates tueuses.
On trouve aussi dans le progressif des sons et instruments
inhabituels dans le rock : violon, clarinette, flûtes,
jusqu'au biniou ou la viole de gambe et surtout, dès
1966-67, les premiers synthés et séquenceurs pouvant
rendre le côté symphonique avec plus ou moins de
crédibilité… les fameux Mellotrons, ARP, Moogs
et Mini-Moogs, Bass-Pedals et Orgues Hammond sont monnaie
courante…
Le progressif ramène donc la pensée musicale de
l'occident sur son piédestal en prenant appui sur
l'énergie du Rock.
Dans son genre, le progressif est donc une forme ultime et
très louable pour qui cherche du sens dans la musique
occidentale.
Mais c'est là qu'il faut être prudent : les
musiques du monde et les autres genres ethniques nous apprennent
qu'il y a d'autres caractéristiques riches de sens que la
musique occidentale ne connaît pas et ça, les
musicologues le savent bien, les petits cachotiers.
Qu'est-ce qu'y dit ?
La thématique du progressif (paroles et univers
évoqués), sans être braquée sur un
thème particulier, s'écarte aussi du rock classique :
les thèmes abordés sont rarement ceux de l'univers
machiste du rock (I love you-you love me) ou des
préoccupations socio-politico-économiques habituelles
(J'ai perdu mon boulot à l'usine ; Société, je
te hais ; Vietnam aïe-aïe-aïe ; La vérole sur
vos gueules ...) mais plutôt des thèmes à
caractère fictif, d'émancipation, de science-fiction,
ou de philosophie, écologie, humour absurde, heroic fantasy,
contes de fée, gestes médiévaux, liste des
courses...
Bref, il ne s'agit plus des 3 cavaliers mâles de
l'aRockalypse : Sex, Drugs and Rock'n Roll mais d'une forme de
musique… disons androgyne, ce qui poussera plus d'une fois
certains détracteurs à qualifier les progresseux de "
tapettes à longs cheveux des années 70 ".
Partant de ces thèmes et de l'aspect " grandiloquent " de
la musique progressive, on va également y trouver, par
extension, une imagerie limite kitsch : décors et costumes
extravagants, coiffures émaillées de poudre d'or,
guitares à cinq manches, bottes de sept lieues,
déguisements surréalistes... le pire et le meilleur
comme tout ce qui a jalonné les 70's.
Le progressif deviendra véritablement un genre
médiatique entre 1970 et 1976 environ, période durant
laquelle nous seront fournies les pièces les plus
surprenantes et les plus significatives du mouvement.
Mais attention, ce mouvement l'est devenu par choix du public et
des médias.
Il fallait bien étiqueter toutes ces musiques
inclassables, tous ces albums qui n'étaient ni du Jazz, ni
du rock, ni de la musique classique, ni du folk ni rien de "
codifié " de façon claire... il fallait bien trouver
des chefs de file pour établir des comparaisons et trouver
un nom et en parler.
L'étiquette devint "ROCK PROGRESSIF" et les quelques
groupes cités ci-dessus passèrent à la
postérité (du moins jusqu'à maintenant).
Et maintenant ?
Beaucoup d'autres ont enregistré des albums et eu leur
heure de gloire, un peu partout dans le monde (mais principalement
en Europe, le mouvement étant parti plus
précisément d'Angleterre, ce qui n'est pas un hasard
mais une autre longue histoire).
Cependant, le mouvement d'émancipation des 70's
s'essouffle et les producteurs de disques se tournent petit
à petit vers autre-chose : la Disco, le Punk et à
l'orée des 80's : la New Wave et ses dérivés,
avec l'explosion de la musique électronique et l'abandon
total de tout ce qui est purement acoustique.
Les groupes progressifs tombent alors comme des mouches et seuls
quelques-uns, qui ont acquis une notoriété sans
pareille, restent sur le marché (c'est qu'il en faut des
sous pour faire des trucs pareils).
Ce sera principalement Yes et Genesis mais en retournant leur
veste pour proposer une musique plus accessible et plus rentable :
de la pop fm (Et pan dans la gueule de Collins !).
En effet, les premiers hits mondiaux dignes du top 50 (Et pan
dans la gueule d'Anderson !) de ces deux groupes tombent vers
1980-82 : Abacab, Mama, Turn it on again, Owner of a lonely heart
sont de belles chansons mais n'ont plus rien à voir avec les
élans visionnaires et symphoniques que ces groupes nous
donnaient encore un ou deux ans plus tôt.
Kansas avec ses boursouflures à la ZZ Top n'est pas mal
non plus d'ailleurs…
A partir de ce moment, on peut considérer, que le
progressif est médiatiquement mort et ne drainera plus que
quelques nostalgiques aux longs cheveux aujourd'hui grisonnants ou
quelques amoureux de la musique émancipée comme
nous.
Le mouvement sera aussi récupéré et
amalgamé au Hard pour nous donner la FM (Asia, Rush,
GTR…) au détour des années 80.
Dans tous ces groupes " dinosaures ", les
caractéristiques les plus évidentes du progressif
sont grossies et exagérées jusqu'au ridicule, en
faisant vraiment un sous-genre de l'industrie du rock par des tics
: utilisation répétitive de sons particuliers de
guitares et de claviers pompeux, réverbérations
abusives, thèmes-clichés récurrents, grilles
d'accords et rythmes bien usés jusqu'à la corde.
Bref, une caricature grossière qui fait qu'on se souvient
aujourd'hui du prog comme d'une curiosité bien
dégoulinante d'illusions et surtout bien pompeuse des
années 70, au même titre que les Claudettes de Cloclo
ou les favoris de Jacques Martin.
Le genre, parce que médiatisé, a été
soumis aux limitations et clichés d'usage.
Les compositions ou les thèmes, les sons surtout sont
trop souvent comparés (très souvent plagiés)
à quelques grands noms des années 70, toujours les
mêmes : Yes, Genesis, King Crimson, ELP…
C'est bien là une preuve de conditionnement,
d'enfermement du genre dans des codes assez stricts. Il faut que
ça " sonne comme… " ou " ça fait penser
à... ".
Le retour nostalgique aux sources sous forme de tributes
nombreux en est une preuve de plus ; les clones et cover-bands
pullulent (Fragile pour Yes, Regenesis, The Watch et Genesis
Project pour Genesis, Cannonball pour Supertramp… ).
Résultat : on en parle aujourd'hui comme d'un " genre
dépassé" avec ses caractéristiques musicales
propres, ses sons, ses structures et ses attitudes.
Le progressif n'est pas un genre, c'est un état
d'esprit qui tient à se dépasser
constamment…
C'est pourquoi King Crimson arrête de produire de la
musique chaque fois qu'ils ne trouvent plus rien de neuf,
évitant de se répéter de façon
alimentaire et nostalgique.
Yes n'a malheureusement pas eu la même démarche,
les cons.
Pour le reste, médiatiquement, il a fallu attendre
l'avènement des autoproductions et des petits labels
indépendants pour vivre, au début des années
90, un renouveau de la " démarche ", mais est-ce vraiment un
renouveau ?
Ou n'est-ce qu'une production nostalgique de plus qui contribue
à alimenter la forme pompeuse du " genre " ?
Avec des groupes comme Spock'Beard, Dream Theatre, the Flower
Kings et autres nombreux groupes très inspirés venant
aujourd'hui des 4 coins du monde, on touche au pire comme au
meilleur, au manque d'innovation aussi malheureusement.
Ce n'est heureusement pas sans exceptions bienvenues.
Nous sommes donc à l'heure du NEO-prog, autre
étiquette…
C'est aussi l'heure de gloire des rares groupes qui ont
continué à y croire ou à essayer de trouver un
public à travers les 80's comme Marillion, Arena, Pendragon,
Camel ou IQ qui a démarré au plus sale moment, en
1979.
Mais les années ont passé et ces groupes
n'échappent pas non plus à l'analyse des tics et de
la nostalgie d'une production maintenant presque
standardisée et codifiée. Ils ne nous
présentent presque plus rien de neuf.
Finalement, le progressif, pour toutes ces raisons, n'est qu'un
genre (donc une limitation) de plus à ajouter aux multiples
tiroirs de l'industrie du disque, qui se ramifie de plus en plus
jusqu'à l'absurde.
Malgré la passion qui nous pousse vers cette musique,
c'est plutôt régressif non ?
Qu'en penser ? Snif…
Personnellement, je préfère le terme " permissif "
en espérant ne jamais le voir sur une pancarte de rayon chez
un disquaire.
Afterthought : Avec les Madelboys, nous venons d'enregistrer nos
premiers morceaux en studio.
En écoutant la galette, c'est clair : nous tombons, selon
moi, aussi dans une certaine nostalgie mais bon, on
n'échappe pas à ses influences et y a que l'intention
qui compte…
You call yourselves progressive
I say it's all regressive
You think you can stand in judgement
So listen here and I'll remind you :
Preaching the converted
'cause it's all you know
Music's dead because
It's all about the money now...
(Preaching the converted - Test of wills - Magellan 1995)
Music speaks through one language but in many dialects
(Tracts Promo Discipline Global Mobile 1996)
J'espère que c'était clair et instructif, je n'ai
pas l'habitude d'écrire des articles de ce type.
J'aurais encore beaucoup à dire mais pour de plus amples
informations et un suivi actif du mouvement, j'invite les
motivés à visiter le site du fanzine "
prog-résiste " (ça dit bien ce que ça veut
dire…) dont l'adresse figure dans notre page de liens.
Là, vous trouverez le meilleur… et…
aussi… brhum…
Quelques albums phares ?
Ceci est une liste reprenant des célébrités
très reconnues par tous et d'autres uniquement par moi, elle
n'engage donc que mon point de vue…
- Fox Trot et The Lamb lies down on Broadway de Genesis
- Close to the edge et Relayer de Yes
- Ashes are burning de Renaissance
- Discipline et Red de King Crimson
- Leftoverture de Kansas
- Pictures at an exhibition d'Emerson Lake and Palmer (ELP)
- Soft Machine (éponyme)
- H to He de Van der graaf generator
- The power and the glory de Gentle Giant
- Thick as a brick de Jethro Tull
- UK (Eponyme)
- Defector de Steve Hackett
- Grand Hotel de Procol Harum
- Entrata de Premiata forneria marconi
- Shamal de Gong
- Mecanik destrucktiw kommandoh de Magma
- Hybris d'Anglagard
- Mirage de Camel
- Concerto for a rainy day d'Electric light orchestra (ELO)
- Air conditionning de Curved air
- Flash in the can de Flash
- Western culture de Henry Cow
- Animals de Pink floyd
- Birds of fire de Mahavishnu orchestra
- The grand Wazoo de Frank Zappa
- Hergest ridge de Mike Oldfield
- Romantic warrior de Return to forever
- Olias of Sunhillow de Jon Anderson
- Ever d'IQ
- Morpio morpio flatulensis de S£aw
- Moving waves de Focus
- Jester de Machiavel
- The spirit of eden de Talk talk
- The light de Spock's beard
- Back in the world of adventures des Flower Kings
- Feels good to me de Bill Bruford
- Vemod d'Anekdoten
- Globalys (Eponyme)
- Morte Macabre (Eponyme)
- Happy the man (Eponyme)
- Transatlantic de Stolt-Morse-Portnoy-Trewavas
- Metropolis, scenes of a memory de Dream Theatre
- Hour of restoration de Magellan
- The polite force de Egg
- …Goes to the Collégiale de Madelgaire
- etc
De la littérature sur le sujet ?
- Listening to the future, the time of progressive rock (Bill
Martin,Open court USA 1998)
- Rocking the classics, english progressive rock and the
counterculture (Edward Macan, Oxford university press 1997)
- The music is all that matters : a history of progressive rock
(Paul Stump, London quartet books 1997)
- Rythm and noise : an aesthetics of rock (Theodore Gracyk,
Durham, N-Y 1996)
- Rock : the primary text; developing a musicology of rock
(Buckingham : Open university press 1993)
" ET MAINTENANT, JE VAIS ME COUCHER ! "
Pascal 'Alf' Rocteur
Créé le samedi 20 octobre 2001
Revu et corrigé le lundi 21 janvier 2002 et le samedi 13
avril 2002
Version mise en ligne le 20 mai 2002
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